Eric Libertad

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État :: Sans engagement

Des favelas de São Paulo aux bases de la région de Lyon : l’idylle de la police française avec les violentes unités du Brésil

Sun, 15 Sep 2024 23:37:39 +0200 dernière modification : Sun, 15 Sep 2024 23:38:19 +0200

Eric Libertad

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Quelqu'un d'abo à libération pour lire cet article ?

https://www.liberation.fr/societe/police-justice/des-favelas-de-sao-paulo-aux-bases-de-la-region-de-lyon-lidylle-de-la-police-francaise-avec-les-violentes-unites-du-bresil-20240915_5NVF3ZQXQRE6RC5VHJDZP26F4Q/

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Mon, 16 Sep 2024 12:40:54 +0200

nadloriot

nadloriot@diaspora.psyco.fr

voilà :

Dans une caserne d’un bataillon de la police militaire brésilienne, un policier parisien, Steve L., pose fièrement, devant un hélicoptère, avec le drapeau de son unité dans les mains. La photo est postée en juin 2022 par le compte Instagram de l’amicale de la compagnie de sécurisation et d’intervention de Paris (CSI 75), et likée par l’un des plus hauts responsables de la préfecture de police, le directeur de l’ordre public et de la circulation, Jérôme Foucaud. Le cliché est accompagné de cette légende : «Stage au Brésil pour l’un des effectifs de la CSI 75 avec pour objectif de savoir patrouiller dans des milieux à hauts risques (style favelas…)» Sur d’autres photos, publiées quelques jours plus tôt par le bataillon d’actions spéciales (Baep) de la police militaire de Campinas, près de São Paulo, on voit le même agent, patch «Police nationale» au bras, en action lors d’exercices réalisés avec cette unité.

Les polices militaires, propres à chaque Etat du Brésil, sont chargées de la sécurité publique. Elles comptent en leur sein des bataillons chargés des «opérations spéciales» qui accumulent les accusations de violences, d’exécutions sommaires et de bain de sang. Le plus connu d’entre eux est le «Bope» dont l’insigne représente une tête de mort plantée d’un poignard, sur fond de pistolets croisés. L’ex-président d’extrême droite Jair Bolsonaro, au pouvoir de 2019 à 2022, avait fait de ces bataillons un emblème de sa politique répressive. Dans un rapport consacré au Brésil, l’Observatoire de l’usage mortel de la force en Amérique latine et dans les Caraïbes a recensé plus de 5 600 personnes tuées en 2022 par la police brésilienne, comme en 2021, et près de 6 000 en 2020. A titre de comparaison, on compte environ mille personnes tuées par an aux Etats-Unis et une trentaine en France. «Au Brésil, les policiers tirent d’abord et discutent après», illustre un ancien attaché de sécurité intérieure à l’ambassade de France au Brésil.

«Techniques de progression dans les favelas»

Que peut donc faire Steve L., agent à la CSI 75, dans un bataillon de police militaire brésilienne ? Contactée à ce sujet, la préfecture de police de Paris indique que ce stage, dont il était le seul participant, s’inscrit dans «une mission d’échange sur le thème des techniques d’intervention». Un voyage au Brésil de deux semaines, financé par les autorités du pays et le ministère de l’Intérieur français. Les liens entre la préfecture de police et le Brésil ne se limitent pas à ce stage. Un an plus tôt, en mai 2021, des agents des polices militaires de São Paulo avaient été accueillis à Paris. La délinquance, les lois et les pratiques policières en France et au Brésil ne sont-elles pas trop éloignées les unes des autres pour qu’un tel échange soit pertinent ? La préfecture de police n’a pas répondu à cette question.

Le cas de Steve L. et de la venue en France d’agents des bataillons des polices militaires de l’Etat de Sao Paulo n’est pas isolé. A de nombreuses reprises, des unités d’intervention tricolores ont traversé l’Atlantique pour participer à des formations dans le cadre diplomatique de la coopération sécuritaire. En 2009, d’après le journal brésilien O Globo, cinq hommes du Raid se rendent à Rio pour enseigner leur savoir-faire au Bope local, en prévision des grands événements sportifs des années suivantes : coupes des confédérations (2013) et du monde (2014) de football, et Jeux olympiques de Rio en 2016 – année durant laquelle des policiers de l’unité reviennent.

C’est en vue de cette dernière échéance que le groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) se rend, lui aussi, dans la deuxième ville brésilienne, en 2015. «On n’a pas de leçons à leur donner. On leur a apporté des éléments en plus, sur la libération des otages, le terrorisme», déclare alors le responsable de l’unité à l’AFP. Soulignant que l’apprentissage n’est jamais à sens unique : «Le Bope nous a présenté des techniques de progression dans les favelas où il y a des imbrications avec la population et des problèmes de dommages collatéraux.» Les échanges prospèrent : à l’automne 2023, de nouveau, l’unité de la gendarmerie va former le Bope à São Paulo, ainsi que des policiers du dixième Baep. Sur sa page Facebook, le bataillon assure que «le partenariat entre la police militaire de São Paulo et la France dure depuis 1906 avec l’arrivée de la première mission française».

Exercice dans la salle de concert lyonnaise du Transbordeur

Côté police nationale, on ne prétend pas à tant d’ancienneté, mais tout de même. «Cela fait trente-deux ans que nous partageons des informations avec les polices brésiliennes», déclarait ainsi à la presse locale l’attaché de sécurité de l’ambassade française lors d’un déplacement du Raid à Florianópolis en 2022, pour former le Bope de l’Etat de Santa Catarina (dans le sud du pays), et son équivalent dans la police civile, la coordination des opérations spéciales (Core). Et d’expliciter : «Il est important d’avoir cet échange, les policiers de Santa Catarina connaîtront nos techniques, mais aussi deux policiers français apprendront la réalité de Santa Catarina.» Preuve que, là encore, la réciprocité est de mise. L’année précédente, la même opération s’était déroulée dans l’Etat du Ceará (nord), là encore avec la Core et le Bope locaux.

Les liens entre ces unités brésiliennes et la police française prennent aussi des formes moins officielles. Et si les unités d’intervention françaises se déplacent régulièrement au Brésil, elles savent aussi rendre l’invitation. Ainsi, à l’automne 2022, plusieurs membres de polices civiles et militaires brésiliennes – notamment du Bope – sont venus en France pour participer à des exercices communs. Aux côtés d’«opérateurs» suisses et italiens, les Brésiliens ont été accueillis par des membres du Raid et du commando parachutiste de l’air n° 10 (CPA10), une unité de l’armée française spécialisée dans la libération d’otages.

Le programme de ces journées ? Un exercice dans la salle de concert lyonnaise du Transbordeur ; un autre dans des TGV désaffectés sur un site exploité par l’entreprise Vinci dans l’Ain ; un autre encore dans des bus en Isère… Pour pratiquer le combat rapproché, la quarantaine d’hommes ont aussi pu utiliser les infrastructures du camp militaire de la Valbonne. Situé à 25 km de Lyon, il est notamment le siège du 68e régiment d’artillerie d’Afrique. Sur la photo de groupe qui conclut cette semaine de formation, prise sur le toit d’une tour du quartier de la Part Dieu, les hommes en tenues noires ou en treillis, visages masqués ou floutés, tiennent des drapeaux. Celui du Brésil côtoie des patchs français. Sont aussi déployés, entre autres, les fanions de la Core et du Bope de l’Etat du Pernambouc, sur lesquels les têtes de mort sont omniprésentes.

Anciens légionnaires

Cet échange international est patronné par la société Tribe Ops. Derrière ce nom et son symbole guerriers (un tomahawk et un crâne), on trouve le Brésilien Umberto Sampaio, qui revendique sur LinkedIn un passage dans la police de l’armée brésilienne, puis dans la Légion étrangère française pendant vingt ans. «Tribe Ops est un projet d’échanges entre les unités opérationnelles qui vise le partage d’expérience sur les plans tactiques, logistiques et humains, avec pour objectif d’optimiser la performance des opérateurs de ces unités. Le projet est né de conversations entre frères et camarades, sur la nécessité d’augmenter nos connaissances, en apprenant, en enseignant, en comparant ce que fait chaque unité», explique Umberto Sampaio, en portugais, face caméra, dans l’une des nombreuses vidéos promotionnelles de la formation lyonnaise de l’automne 2022. Ces clips sont produits par une autre entreprise, Black Fox Arts, derrière laquelle on retrouve, là encore, d’anciens légionnaires, dont Joab Costa Guimaraes, surnommé «Jow», un autre Brésilien.

Sampaio et Costa Guimaraes sont deux artisans actifs du rapprochement entre les bataillons les plus violents des polices brésiliennes et françaises. Avant Tribe Ops, le premier était à la tête de Storm Combat, qui réunissait déjà des opérateurs brésiliens et des policiers et militaires français pour des entraînements conjoints en France. Storm Combat et Tribe Ops sont toujours actifs au Brésil d’après leurs publications en ligne, et continuent d’y dispenser des entraînements à destination des polices militaires et civiles. Quant à «Jow», il a lui aussi pris part à la semaine de formation dans la région de Lyon.

Le lobbying des deux hommes pour tisser des liens entre les polices militaires brésiliennes et la France ne s’arrête pas là. Ils ont aussi invité au Brésil un YouTubeur français et ancien gendarme, «Klaim». Ce dernier a consacré une longue vidéo à sa journée passée avec le Bope de l’Etat de Bahia, et aux formations de Tribe Ops. Le contenu de sa chaîne est principalement à destination des forces de l’ordre. «On m’a proposé une expérience complètement folle, partir au Brésil pour filmer l’une des unités les plus prestigieuses du monde, la Bope», dit Klaim, de son vrai nom Clément Richard. «L’idée était d’échanger humainement et techniquement», ajoute le YouTubeur en introduction de sa vidéo.

Sampaio et Jow ont aussi dispensé leurs savoirs guerriers au sein de l’Institut français de sécurité, l’IFS. Le stand de tir de cette entreprise, dirigée par un autre ancien légionnaire, Tibor Vass, à qui Libération a déjà consacré plusieurs enquêtes, est très fréquenté par les forces de l’ordre françaises. Sur des images publiées par l’IFS on voit Umberto Sampaio et Jow poser sous toutes les coutures et mimer une progression tactique, lourdement armés et en treillis, patchs de l’entreprise au bras. Et en 2020, le premier était photographié avec un autre formateur lors d’une «journée d’échange avec l’un des pelotons d’intervention du 1er régiment d’infanterie de la garde républicaine» – une unité de gendarmerie qui a parmi ses prérogatives la sécurité de l’Elysée. Crâne du bataillon

L’imagerie d’une police violente face aux délinquants, véhiculée notamment par les Bope à coups de vidéos nerveuses vantant leurs opérations, s’invite parfois même sur les uniformes d’agents français. Ainsi, Franck Verriest-Correard, condamné à plusieurs reprises pour des faits de violences (il a écopé d’une interdiction définitive d’exercer lors de son dernier procès, mais a fait appel de la décision), se mettait en scène avec l’insigne de cette unité alors qu’il était en poste à la brigade anticriminalité de Seine-Saint-Denis. Des agents ont aussi été photographiés en train de porter le crâne du bataillon : en civil, devant le siège parisien de l’Inspection générale de la police nationale en 2019, ou lors d’une intervention à Marseille la même année. Et on retrouve l’insigne du Bope sur des objets vendus par la boutique Cops 13 (mug, pull…), qui propose du matériel à destination des forces de l’ordre.

Contacté à propos des échanges entre polices françaises et brésiliennes, le ministère de l’Intérieur assure qu’ils s’inscrivent dans le cadre d’une convention de coopération en matière de sécurité publique signée entre les deux pays. «Le Raid et le GIGN bénéficient d’une grande renommée au Brésil, indique le service de presse du ministère dans une réponse écrite. De leur côté, les unités d’intervention spécialisées du Brésil font face à des phénomènes criminels d’une particulière intensité.» Le ministère explique que cette coopération a pour but de «promouvoir un règlement non létal des situations de crises même les plus extrêmes». Dans cette réponse, la place Beauvau se borne donc aux formations organisées au Brésil, et ne dit rien de la venue de policiers militaires brésiliens en France, ni du rôle dans ces relations de la société Tribe Ops. Son fondateur, Umberto Sampaio affirme seulement qu’«à la demande des unités, les détails des événements sont confidentiels» et indique qu’il ne travaille désormais plus à l’IFS. Joab Costa Guimaraes n’a de son côté pas donné suite à nos sollicitations.

Wed, 18 Sep 2024 10:22:57 +0200

nadloriot

nadloriot@diaspora.psyco.fr

bon ben dire merci ça ne coûte rien tu sais...

Wed, 18 Sep 2024 10:46:06 +0200

Eric Libertad

ericalkaest@fedi.thechangebook.org

Oh oui MERCI @nadloriot j'ai pas eu la notification 😞

Je vais lire cet article avec intérêt dés que je peux

Wed, 18 Sep 2024 16:38:09 +0200

Eric Libertad

ericalkaest@fedi.thechangebook.org

Grrr mon commentaire (un peu long) vient de disparaitre.

Wed, 18 Sep 2024 16:40:43 +0200

Eric Libertad

ericalkaest@fedi.thechangebook.org

Cet article est particulièrement intéressant dans le contexte d'une internationalisation du flicage et de la répression dont on a vu un exemple criant pendant les JO de Paris où des flics de dizaines de pays sont venus avec leurs véhicules faire ce que la coercition appelle "la gestion de foule"...

Wed, 18 Sep 2024 18:13:04 +0200

Eric Libertad

ericalkaest@fedi.thechangebook.org

Il n'est pas sans rappeler que la transmission de savoirs-faire répressifs s'est d'abord fait après 1962 (notamment via l'escadron de la mort de Paul Aussaresses qui avait sévi en Algérie) et pendant toute la décennie 1970 des flics et armée françaises vers de nombreux pays ayant glissé dans la dictature, dont la fameuse Opération Condor qui a traqué de nombreux opposants du Chili, de l'Argentine, de la Bolivie, du Brésil, du Paraguay et de l'Uruguay.
Voir à ce sujet :
EXCELLENT--Lundi Investigation -- Escadrons De La Mort -- L'école Française

https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Aussaresses La plupart des gouvernements Français (Tous ...) ce sont très bien accommodés de ces pratiques.. Deux pays meurtris émergent particulièrement de cett...

Wed, 18 Sep 2024 18:21:18 +0200

Eric Libertad

ericalkaest@fedi.thechangebook.org

Pour le coup, on voit aujourd'hui que ces "transferts de compétences" répressives se font aussi dans l'autre sens : Les bataillons spécialisés du Bope, après avoir violemment "pacifié" les favelas de Rio pour le Mundial de foot et les JO invitent les flics français pour leur transmettre leurs méthodes violentes que ces derniers mettent à leur tour en œuvre pour casser du Kanak en Nouvelle-Calédonie, en Martinique au moment où j'écris ce commentaire.

Wed, 18 Sep 2024 18:28:38 +0200

Eric Libertad

ericalkaest@fedi.thechangebook.org

Voir aussi la mini-série "Au nom du maintien de l'ordre" :

Au nom du maintien de l'ordre - Reculez (1/2) | ARTE

Au nom du maintien de l'ordre - Presque mortel (2/2) | ARTE

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