Disons-le tout net, les données dont nous disposons ne permettent pas d’observer l’évolution des revenus depuis 2021, dernière année pour laquelle l’Insee a publié des chiffres. Et pourtant, nous avons de bonnes raisons de penser que les trois dernières années, marquées par le retour de l’inflation, ont été favorables aux plus aisés.Côté salaires, la progression annuelle est de l’ordre de 4 % en 2022 et 2023 : globalement, les fiches de paie suivent plus ou moins l’inflation, avec retard certes, et pas dans toutes les entreprises. Le retour de la hausse des prix met en jeu des rapports de pouvoir : celui qui s’en sort le mieux est celui qui est en position de force pour négocier. Les perdants sont en général les moins qualifiés des petites entreprises en situation concurrentielle qui disposent de peu de marges, notamment dans le domaine des services.Les revenus du patrimoine progressent bien davantage. L’Insee table sur une hausse de 7,3 % en 2022 et de 15,5 % en 2023, soit trois fois plus que la progression des revenus d’activité [1]. Dans une étude parue en décembre [2], l’institut estimait que les dividendes avaient augmenté de 10 % en 2022 et d’autant en 2023. Mais ces revenus, versés aux propriétaires d’actions, ne concernent qu’une petite fraction de la population : 96 % des dividendes sont attribués à 1 % de l’ensemble des foyers fiscaux selon France Stratégie (donnée 2021) [3].Pour bénéficier de revenus tirés d’un patrimoine, il faut pouvoir mettre de l’argent de côté pour se constituer ce capital, ce qui est loin d’être le cas du commun des mortels. Les revenus du patrimoine représentent 18 % des revenus des riches contre 4 % de ceux des autres ménages, selon l’étude réalisée par Vivien Charbonnet de l’Université de Tours [4] (d’après les données de l’Insee pour 2019).Depuis cette date, les revenus du patrimoine sont beaucoup moins imposés : les plus riches bénéficient à plein de la hausse de ce type de revenus. Côté imposition toujours, cerise sur le gâteau, depuis le 1er janvier 2024, la taxe d’habitation a été totalement supprimée, même pour les plus hauts revenus, ce qui améliore leur situation déjà privilégiée.On ne connaitra vraiment la situation des revenus de 2024 qu’en 2026 avec la publication des données de l’Insee sur les inégalités de niveaux de vie. Mais il y a fort à parier que les riches, et notamment leur frange supérieure, auront largement tiré leur épingle du jeu.