LES HYPER-RICHES BLABLABLA
Dans la liste des 250 messages récurrents qui me lourdent le plus, je crois que "les super milliardaires sont responsables du RC", et "'il faut taxer les super milliardaires pour sauver la planète" et "le salut viendra des "0,0001%" les plus riches", vont finir par entrer dans mon top 10.
Cette focalisation sur les hyper-hyper-riches arrange tout le monde. Elle permet d'occulter la responsabilité des classes aisées (dont l'extension à mon avis déborde largement la bourgeoisie proprement dite) dans la catastrophe climatique considérée sous l'angle historique, géographique, social, politique, colonial et néocolonial. Elle s’accommode fort bien du discours éco-capitaliste dominant en évitant de questionner la structure même du capitalisme global sur laquelle repose la possibilité de mener les vies que ces classes aisées mènent. (et dont GW Bush avait assumé qu'elles n'étaient pas négociables - ce que, 20 ans plus tard, affirment tout aussi péremptoirement la plupart des concernés)
La répétition, sous forme de litanie, des excès ahurissant de cette clique d'hyper-riches, finit par produire un "nous" fort commode : les bourgeois aiment à se compter, quand ça les arrange, au moins du point de vue statistique, sinon affectif, dans ce "nous" - disons : aux alentours de la plèbe. Cette entourloupe comptable permet de créer un "nous l'humanité" (dont on aura soustrait de manière fort commode une poignée de super milliardaires) et un "nous sommes tous finalement dans le même bateau" (et un "pauvre de nous", victimes des excès de quelques irresponsables). Ce qui est parfaitement indécent. Montrez du doigt les milliardaires, et toutes les classes "aisées" non seulement se frottent les mains, mais gagnent un point de vertu en passant.
Faites disparaître ces milliardaires du jour au lendemain, non seulement il en viendra aussitôt d'autres, des classes juste en dessous, pour prendre leur place - parce que c'est ainsi que le système d'accumulation du Capital fonctionne, tant qu'on ne l'arrête pas, d'une manière ou d'une autre, ces produits du capitalisme que sont "les grande fortunes" ne cesseront pas d'exister. Mais la catastrophe climatique ne sera pas freinée d'une dixième de degré. Ça n'y changera rien. Les inégalités seront toujours aussi abyssales. On continuera de sacrifier quelques milliards d'êtres humains (sans parler des non-humains), pour qu'un autre milliard soit sauvé. C'est une question d'échelle. Elle est fondamentale, cette question d'échelle. Et peu de gens la conçoivent de manière réaliste.
J'entends déjà certain.e.s dire : "oui, mais s'en prendre aux milliardaires, ce serait déjà un début."
Mais ce ne serait le début de rien (et considérez bien que vos hyper-riches sont aussi ultra-militarisés et que les lois, et l'État tout entier, se font un devoir de les protéger). La vérité, très inconfortable, c'est que la part des habitants de cette planète dont le mode de vie entraîne (depuis bien longtemps en réalité) fatalement (parce qu'il en dépend !) d'ahurissantes injustices sociales et environnementales (et je passerais sous silence ici la structure profondément raciale du capitalisme global), cette part dépasse largement les 0,0001% et même les 1% qui avaient soulevé les contestataires à New York en 2011 (certain.e.s avaient fini par l'admettre, en revenant plus tard sur cet épisode).
Quand on discute des responsabilités, notez comment les classes aisées européennes, quand elles ne se précipitent pas sur les boucs émissaires classiques que sont "les chinois", les "indiens", et bientôt les "africains", avec leur supposé (bien que complètement périmée) insatiable appétit sexuel qui les portent à se reproduire de manière irrationnelle et menacer les équilibres démographiques mondiaux (traduisez : la domination économique des blancs) , tentent de de disculper en minimisant leur richesse et leur fortune, en relativisant leur propres excès ("mais il faut bien que je prenne l'avion de temps en temps, pour rendre visite à ma fille qui fait ses études en Australie, et d'ailleurs, j'ai beaucoup diminué les voyages en avion, lors de mes dernières vacances à Venise, j'ai pris le train au retour !" et : "Vous savez, mon SUV dort le plus souvent dans le garage. Je me déplace de plus en plus à bicyclette").
#1%
#Milliardaires #CatastropheClimatique